mercredi 11 mars 2015

Les Misérables (Parties 1 et 2) 1925

Jean Valjean (Gabriel Gabrio) et Cosette (Andrée Rolane)
Un film en quatre parties d'Henri Fescourt avec Gabriel Gabrio, Sandra Milowanoff, Jean Toulout, Andrée Rolane, Renée Carl et Georges Saillard

Jean Valjean (G. Gabrio) sort du bagne après 19 ans. Alors que toutes les portes se ferment devant lui, Mr Myriel (Paul Jorge) lui offre le gîte. Valjean lui dérobe son argenterie et pourtant Myriel L'innocente face aux gendarmes...

Valjean (G. Gabrio)
La superbe adaptation du roman de Victor Hugo réalisée par Henri Fescourt pour la Société des Cinéromans est de nouveau visible à la Fondation Jérôme Seydoux-Pathé dans une nouvelle restauration numérique 4K. J'avais vu le film en 2009 dans une copie teintée de la Cinémathèque de Toulouse qui était déjà de belle qualité, mais cette restauration offre une qualité d'image époustouflante avec une finesse des détails et des contrastes, et des teintages et virages numériques parfaitement dosés. C'est donc un plaisir de se replonger dans l'univers de Victor Hugo dans ces conditions. Les personnages des Misérables sont des achétypes du mélodrame: l'ancien bagnard, la fille-mère abandonnée, l'enfant martyrisée, le curé magnanime etc. Et pourtant, cette histoire demeure palpitante même après la vision de nombreuses versions filmées. Fescourt se montre à la hauteur du challenge: retracer en plus de six heures l'oeuvre hugolienne avec une troupe de comédiens parfaitement choisis. Délaissant les studios, il part sur les traces de ses personnages à Digne et à Montreuil-sur-mer avec des extérieurs particulièrement saisissants qui nous projettent au dix-neuvième siècle. Jean Valjean a été icarné au cinéma par de très grands acteurs tels que Henry-Krauss dans la première version cinématographique d'Albert Capellani en 1912 et évidemment par Harry Baur dans la version parlante de 1934 réalisée par Raymond Bernard. Le Valjean de 1925, Gabriel Gabrio, est lui aussi un merveilleux interprète du rôle. Plus jeune que ses confrères, il confère au personnage du bagnard un regard, une silhouette et une présence que l'on n'oublie pas. Le bagnard asocial redevient peu à peu sous nos yeux un être humain sous l'influence du très bon et très saint Monseigneur Myriel. Fescourt a le temps de nous montrer la lente progression de l'homme sous l'écorce de la bête.
Fantine (S. Milowanoff)
Pour incarner Fantine, Fescourt s'est tourné vers la merveilleuse Sandra Milowanoff, qui pourtant n'avait pas été son premier choix pour le rôle. Elle n'avait pas de formation théâtrale car elle venait de la danse. C'est Feuillade qui fit d'elle une actrice de cinéma en 1920 et bien lui en prit. Il n'y a aucun geste théâtral chez elle, elle se déplace d'instinct comme une danseuse. Elle évite les excès mélodramatique et réussit à nous faire verser une larme lorsqu'elle se décide à aller se prostituer pour payer la pension de Cosette. Elle vit son rôle plus qu'elle ne l'interprète. Le malheureux spectre qui se déplace sous la neige se transforme en furie face au dandy qui la maltraite. La petite Cosette, jouée par Andrée Rolane, est meilleure que Gaby Triquet dans la version de Raymond Bernard. Son allure maigrichonne et ses grands yeux qui lui mangent le visage font d'elle la proie parfaite du couple Thénardier. Evitant la caricature, Renée Carl est une mégère poissarde sans excès et son cher époux, menteur et cupide, est joué par Georges Saillard. Il y a plusieurs séquences dans ces deux premières parties qui restent en mémoire, en particulier la descente aux enfers de Fantine dans les rues de Montreuil et la frayeur de Cosette dans les bois où les arbres prennent vie. Ces Misérables sont le chef d'oeuvre de Fescourt avec sa magnifique adaptation de Monte-Cristo (1928). Vivement la suite!

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